Les hôpitaux sont irréductibles à leurs fonctions rationnelles, palpables ou mesurables. Ils s’organisent autour de registres symboliques et imaginaires qui les façonnent en tant que territoires du soin. Dès 2012, alors que l’hôpital public universitaire connaît d’importantes mutations, le besoin de connaître et reconnaître les valeurs de la « communauté hospitalière » s’est fait ressentir. Dans un contexte difficile, alors que les métiers du soin connaissent un déficit de succès, et que de nouveaux métiers sont couramment créés, les socles ancestraux vacillent et il importe d’identifier et mettre en lumière les valeurs constitutives de la communauté hospitalière qu’elle souhaite sauvegarder ».
La démarche PCI a permis de répondre à un besoin : celui d’échanger, de parler de son métier, de ce qui est important, de ce qui est difficile, de ce qui est beau. Grâce au travail d’analyse du chercheur, mené avec subtilité dans les différents niveaux de lecture qu’il offre, nous avons entre nos mains quelque chose qui nous rappelle que pour assurer sa pérennité, l’hôpital public a toujours été amené à se transformer, entre déconstructions et reconstructions, autour de valeurs qui se régénèrent sous de nouvelles formes.
Si différentes initiatives visant à conserver la mémoire des hospitaliers et l’hôpital sont développées depuis de nombreuses années au CHU de Rouen, ces démarches n’offraient pas les outils pour répondre aux enjeux énoncés plus haut. Pour aller plus loin dans la connaissance de l’institution hospitalière, de ce qui la fait battre à plein cœur pour prendre en charge les patients de la meilleure façon, la démarche ethnologique développée par le géographe yann Leborgne a permis de récolter la parole de ceux qui font l’institution.
Entre 2013 et 2014, les CHU de Rouen et d’Angers, suivis par Caen (2015-2019), se sont investis avec le soutien du ministère de la culture dans un inventaire de leur patrimoine culturel immatériel. Cette démarche a découlé du constat des souffrances éprouvées par leurs personnels qui traversent des mutations économiques et organisationnelles. Dans un contexte de transformation des hôpitaux publics, les difficultés ordinaires des soignants se sont conjuguées avec un mal-être nourri par le sentiment d’une dévalorisation du travail et la crainte de sa déshumanisation. La recherche du patrimoine culturel immatériel a donc reposé sur l’hypothèse selon laquelle une part de ce malaise siège dans une perte des repères induite par ces bouleversements actuels. Questionnant le sens profond du travail des soignants, les hôpitaux de Rouen, Angers et Caen ont entrepris d’identifier et reconnaitre les registres symboliques et imaginaires qui cimentent leur identité culturelle. Cette opération exploratoire n’a pas été pensée « contre les changements », mais en accompagnement de ceux-ci par une mise en lumière révélatrice de la valeur sociale des techniques de soins, laquelle continue d’exister avec la modernisation des pratiques hospitalières.
En 2014, cette recherche a conduit à la reconnaissance et l’inscription par le ministère de la culture (Département du Pilotage de la Recherche et de la Politique Scientifique) du patrimoine culturel immatériel des communautés hospitalo-universitaires dans l’inventaire français du PCI (fiche inventaire Cf annexe 1).
Entre 2017 et 2019, une action de médiation de ce patrimoine a été engagée avec le soutien du programme Culture-Santé de l’ARS et la DRAC de Normandie. Croisant une recherche géo-ethnographique avec une création de photographies plasticiennes, quatre expositions du patrimoine culturel immatériel hospitalier, intitulées « Contre Orcus », ont été ouvertes au public dans le CHU de Rouen, de Caen, de l’ARS et de l’artothèque de Caen.
A partir de 2022 , dans le contexte de la pandémie de Covid-19, afin de rendre hommage aux hôpitaux publics, les auteurs proposent faire découvrir et rendre accessibles au plus grand nombre les résultats de leurs travaux à travers un ouvrage et une exposition itinérante.
L’exposition se tiendra simultanément sur plusieurs sites en partenariat avec Campus Santé, la Direction de la Culture Université de Rouen Normandie, Rouen Sites et Monuments.
Après trois années de maturation, les résultats des recherches menées par Yann Leborgne, en dialogue avec la création artistique du photographe Christophe Halais, ont été retravaillés en vue de la publication de l’ouvrage « Klinê, les territoires du soin ».
L’édition est préfacée de Grégoire Moutel (EREN), Anne Monjaret (CNRS), Thomas Mouzard (Chargé de mission pour l’anthropologie & le PCI au Ministère de la Culture)
Prolongeant l’ouvrage in situ, l’exposition itinérante « Klinê, territoires du soin » donne à tous la possibilité de découvrir l’hôpital sous un nouveau jour. Elle rend visible et perceptible ce qui, de l’hôpital intime, ne se voit pas ou ne s’entend habituellement pas.
Cette exposition a vocation à être accueillie dans différents CHU ou tout lieu souhaitant apporter son soutien à ce regard porté sur les communautés hospitalières.
Hôpital Charles-Nicolle
37 boulevard Gambetta – 76031 Rouen
Hôpital de Bois Guillaume
147 avenue du Maréchal Juin – 76230 Bois-Guillaume
Hôpital Saint Julien
rue Guillaume Lecointe – 76140 Le Petit-Quevilly
Hôpital de Oissel
rue Pierre Curie – 76350 Oissel
Hôpital de Boucicaut
13 rue Boucicaut – 76130 Mont-St-Aignan
Services d'urgences
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